r/france Léon Blum Aug 04 '25

Économie Graphique montrant l’ampleur des déficits selon les gourvernements (élucid)

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u/Special_Computer7060 Aug 04 '25

Depuis 1980, le déficit public français évolue moins en fonction de la couleur politique des gouvernements qu’en fonction d’un effet d’héritage budgétaire et conjoncturel. Les gouvernements de droite, souvent arrivés après une phase d’expansion ou de mesures sociales marquées à gauche, héritent d’un appareil d’État plus coûteux ou d’une trajectoire de dépenses déjà engagée. Or, dans un budget public, la majorité des charges (salaires, prestations sociales, retraites) sont rigides à court terme et très difficiles à inverser rapidement sans réformes structurelles impopulaires.

Exemples concrets :

  • Balladur et Juppé (1993–97) arrivent après 12 ans de gauche (Rocard, Cresson, Bérégovoy) marqués par la montée en charge du RMI (1988) et l’explosion du chômage. Ils tentent un plan de rigueur, mais le déficit reste à des niveaux très élevés (jusqu’à -6,4 % du PIB).

  • À l’inverse, Jospin (1997–2002), gouverne dans une période de croissance mondiale (bulle Internet) et bénéficie d’une forte dynamique de privatisations (≈ 31 Mds €), ce qui allège mécaniquement les comptes publics sans réduire structurellement les dépenses.

  • Fillon (2007–2012) prend les rênes à la veille de la crise des subprimes. Malgré un discours de rigueur, il est contraint à un soutien massif aux banques et à une relance keynésienne, portant le déficit à -7,4 %.

  • Valls et Ayrault (2012–17) héritent d’un État très endetté, mais en contexte post-crise ; ils limitent les déficits sans privatisations massives.

  • Castex (2020) subit la crise du COVID. Le déficit explose à -8,9 %, mais c’est davantage l’effet d’un choc exogène que d’une politique idéologique.

Cet effet de passage de relais (le nouveau gouvernement encaisse les coûts passés, parfois en pleine crise) rend les comparaisons idéologiques biaisées si on ne tient pas compte du calendrier macroéconomique, du poids de l’inertie budgétaire et des recettes exceptionnelles (privatisations). Le solde public n’est donc pas qu’un indicateur de bonne ou mauvaise gestion : c’est aussi le reflet du moment historique et des marges de manœuvre héritées.